RACONTE-NOUS TON DEUIL #1 : Charlotte 🧡

RACONTE-NOUS TON DEUIL #1 : Charlotte 🧡

J'ai appris le 6 janvier 2023 que j'étais enceinte, après avoir remarqué plusieurs symptômes tels que des remontées acides, des maux de ventre extrêmes, et une fréquence inhabituelle de mes visites aux toilettes. Pendant un moment, j'ai été partagée entre le bonheur de réaliser mon rêve d'avoir ma famille et la peur liée à ma jeunesse et au regard des autres. 

J'en ai parlé alors à une amie qui m'a conseillée de le dire à l'infirmière du lycée. J'ai suivi son conseil, et lui ai expliqué ma situation. Malheureusement, elle s'est montrée dans le jugement avec moi, considérant comme immoral de tomber enceinte à cet âge. Malgré tout, elle a appelé le Planning Familial pour moi et pris mon premier rendez-vous. À ce moment-là, je ne voulais en parler à personne d'autre. Seuls mon copain, ma copine, et l'infirmière étaient dans la confidence. Mon copain, tout comme moi, était perdu et craignait la réaction de mes parents, en dépit de sa situation déjà stable. Nous avons donc décidé ensemble qu'il était préférable que j'avorte, même s'il voulait secrètement garder notre bébé. 

S'en sont suivis les premiers rendez-vous, que j'ai dû affronter seule, car mon copain travaillait et ne pouvait pas m'accompagner. Les rencontres avec la conseillère et les deux gynécologues ont été difficiles. L'une des deux n'a pas respecté mon consentement, et a adopté un comportement très froid à mon égard. L'infirmière s'est quant à elle aussi montrée dans le jugement, me lançant des piques lors de la prise de sang et de la signature des papiers. "Vous n'aviez qu'à vous protéger", voilà ce que j'ai dû entendre au lieu des mots bienveillants dont j'avais besoin. 

Est ensuite arrivé le 16 janvier, le jour où j'ai dû prendre les premiers cachets, accompagnée de la maman d'une amie. Ma grossesse s'est alors arrêtée et je suis revenue le 18 janvier afin d'expulser le bébé à l'hôpital. Malheureusement, je l'ai perdu chez moi le lendemain. Cela m'a traumatisée, j'ai été tétanisée et je n'ai pas réussi à arrêter de pleurer.  Mes parents ont enfin été informés le 27 janvier à cause de rumeurs qui couraient déjà. J'ai préféré leur dire moi-même. Ils m'ont soutenue autant qu'ils ont pu et ne m'ont fait aucune morale depuis ce jour. 

Seulement, depuis ce 18 janvier 2023, ma vie s'est arrêtée. L'avortement est tellement difficile à vivre quand on est jeune. Tout le monde répète que c'était la chose à faire, mais je ne pense pas comme eux. Je n'ai pas eu assez de temps de réflexion. Les rendez-vous se sont tellement vite enchaînés que j'ai l'impression que ce sont les médecins qui ont fait ce choix à ma place. Mes parents n'arrivent pas à comprendre pourquoi cela me touche encore après un an, mais je n'y arrive plus. Je me sens tellement coupable. Mon bébé me manque tellement.

Pourtant, j'ai sincèrement essayé de guérir. Je consulte une psy depuis la perte de mon bébé, mais j'ai l'impression que rien n'a changé. Elle m'a diagnostiquée une dépression, et le médecin m'a prescrit un traitement qui me fait sentir encore plus vide que je ne le suis déjà. Les insomnies me tourmentent toutes les nuits, me laissant seulement quelques heures de répit. La culpabilité me ronge et mon copain refuse d'en parler. 

De plus, j'ai perdu tellement d'amis à cause de cette épreuve. Je me retrouve seule dans cette boucle, et je n'arrive plus à m'en sortir malgré tous mes efforts. Je n'arrive plus à aller au lycée, et personne ne comprend. Les crises d'anxiété sont constantes. Je ne sais plus quoi faire. Je ne me suis jamais sentie aussi seule de toute ma vie. J'ai l'impression qu'il manque une partie de moi que je ne retrouverai jamais.

Charlotte, 17 ans

Retour au blog

Laisser un commentaire

Veuillez noter que les commentaires doivent être approuvés avant d'être publiés.